Découvrez l'interview de Marie-Hélène ILLES !

L'année dernière, Marie-Hélène a fait le choix ambitieux de se consacrer à sa vocation de toujours : la couture. Elle a pu compter sur EDLC pour l'assurer afin de mener son projet à bien en toute sérénité. Découvrez son portrait :

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Découvrez l'interview de Marie-Hélène ILLES !

Quel est votre parcours ? Comment vous en êtes-vous venue à créer votre entreprise ?

Je suis Marie-Hélène ILLES et j’habite à Lille. J’ai travaillé pendant une vingtaine d’années à l’Arche, à Wambrechies. C’est une organisation qui accueille des personnes avec un handicap mental et j’étais éducatrice.

Après mon mariage et l’arrivée des enfants, j’ai réduit mon temps de travail, jusqu’à décider de reprendre une activité salariée après l’arrivée de mes jumelles.

J’ai repris le travail dans un collège en tant qu’animatrice pastorale. Puis il m’est arrivé un problème de santé : la perte progressive de l’audition. C’est devenu trop compliqué d’accueillir des élèves en classe.

Après un temps d’arrêt et un burn-out, je me suis demandé ce que j’avais envie de faire. La couture a toujours été une passion pour moi : j’ai fait la garde-robe de mes enfants, la robe de mariée de ma fille, cousu pour mes amis aussi…

Oui donc vous aviez déjà une vraie compétence ! Et vous l’aviez acquise comment cette compétence ?

Par l’expérience. J’ai beaucoup cousu, ça c’est sûr. Lorsque j’étais chez ma mère, elle m’a mise devant une machine. Je sentais que j’avais beaucoup de goût pour ça, je prenais vraiment du plaisir à coudre et à créer. C’était comme avoir plein de pièces et construire quelque chose, c’est le même plaisir que faire un puzzle.

Mes enfants m’ont beaucoup poussée en ce sens aussi, ils voyaient ma compétence et m’ont encouragée.

Donc vous avez basculé à un moment donné ?

J’ai obtenu une rupture conventionnelle avec le collège, ce qui m’a permis d’être suivie dans l’élaboration de mon entreprise avec la BGE. Mon entreprise n’existe que depuis octobre 2022, et c’est vrai qu’avoir des aides sociales ça aide !

Comment avez-vous eu connaissance de la BGE ?

J’ai connu la BGE par Pôle Emploi.

Donc lorsque vous avez demandé votre rupture conventionnelle, vous saviez que vous alliez vous installer ?

Oui

D’accord. Et entre ce moment-là et entre vraiment l’immatriculation, il s’est passé combien de temps ?

10 mois ! C’était tellement long !

Mais ce n’est pas si énorme, pour créer une entreprise. Bon, je suppose que vous aviez commencé à préparer ?

Oui, ça faisait déjà un an que je cousais, que j’essayais de voir ce que je pouvais vendre, ce qui serait rentable… Pour moi c’était long : officiellement, ça a commencé le 1er janvier, je me suis tout de suite inscrite à Pôle Emploi, et puis après il y a eu un premier rendez-vous avec la BGE. Finalement ça n’a commencé qu’en juin ! Ces 6 mois-là, pour moi, ont été vraiment très longs.

J’ai déjà entendu les réseaux d’aide à la création dire que c’était un passage obligé, pour justement éviter la création d’impulsion et que finalement ceux qui respectent et qui sont dans la durée comme ça sont souvent beaucoup plus pérennes. Parce que la création d’impulsion c’est facile, on s’inscrit auto-entrepreneur, en 2 clics c’est fait sur internet, et c’est vrai que le fait de passer ce temps-là, d’attendre, de réfléchir, de construire… Mais c’est vrai que lorsqu’on est impatient c’est dur.

Donc 10 mois, entre janvier et octobre ?  

Oui, l’immatriculation officielle était le 7 octobre.

Votre site internet ? Vous avez trouvé un prestataire ?

J’ai un site internet « delinalautre.com ». Ma boutique sur Sum Up, ce qui me permet aussi d’avoir un boîtier pour les marchés. Depuis fin mai, j’ai rejoint la plateforme Rouspette, qui est spécialisée dans l’économie circulaire.

Je ne connais pas, c’est cette plateforme où il y a plein d’artisans qui peuvent vendre leurs produits ?

Tout à fait ! Rouspette, c’est vraiment spécialisé : il n’y a que des gens qui travaillent à partir de matériaux upcyclés. Par exemple mes produits en lin, je ne les vends pas sur cette plateforme, sauf si c’est du lin issu de fonds de série destinés à être jetés ou détruits.

Aujourd’hui votre activité passe par votre site, cette plateforme et les marchés ?

C’est ça.

Ça marche bien, les marchés ?

Oui, très bien.

Ce sont des marchés de créateurs ?

Les marchés de créateurs marchent très bien, je fais aussi des marchés nocturnes. Je n’avais pas vu que ce n’étaient pas des marchés destinés exclusivement  pour les artisans et ça, ça marche moins bien. La dernière fois, par exemple, j’étais installée à côté d’une dame qui faisait de la revente d’articles qui étaient pratiquement les mêmes que les miens, mais elle les achète en Chine. Je ne pouvais donc pas rivaliser avec ses prix !

Et aujourd’hui votre handicap est complètement invisible. Vous êtes appareillée ?

Oui, oui.

Et aujourd’hui ça ne vous pénalise en rien du tout ? Dans votre activité ?

Dans mon activité ça ne me pénalise pas, tant qu’on ne revient pas aux masques, parce que je lis un peu sur les lèvres aussi.

Est-ce que c’est la BGE qui vous a informée qu’il fallait vous assurer ?

Oui, tout à fait.

Vous y auriez pensé s’ils ne vous en avaient pas parlé ?

J’y avais pensé au niveau de ma propre assurance. A partir de septembre, la BGE m’a informée de mon droit à une assurance gratuite, grâce à mon suivi AGEFIPH. Entrepreneurs de la Cité m’a sensibilisée aux risques présents : si je donnais des cours de couture dans un atelier et qu’imaginons, quelqu’un tombe dans l’escalier, il était important que je sois assurée pour les personnes. Puis j’ai pensé aux marchés et aux personnes qui viennent suivre mes cours de coutures.

C’est vrai que cette aide de l’Agefiph, elle est très bien positionnée.

Non seulement elle est très bien positionnée mais aussi, lorsque mon mari a pris l’assurance chez Entrepreneurs de la Cité, il m’a tout de suite dit « je suis tombé sur une personne, j’ai posé une question, j’ai eu une réponse simple, j’ai posé une deuxième question, j’ai encore eu une réponse simple et compétente ! »

Vous ne vous rappelez pas la personne qu’il a eue au téléphone ? Ca fait toujours plaisir à entendre pour cette personne !

Non malheureusement. Il m’a dit qu’il était tombé sur des gens compétents, une structure à dimension familiale, humaine en tout cas, il était content.

Et votre avenir, vous le voyez comment aujourd’hui ?

Ensoleillé ! [Rire]

Vous avez envie d’évoluer ? Y’a des choses qui vous donnent envie ?

La rencontre sur les marchés c’est très positif ! Dans mon travail-même, quand je suis à l’atelier, c’est vrai qu’il y a une solitude.

J’éprouve beaucoup de plaisir à travailler avec des matériaux qui sont issus de chutes de production, de fin de séries, destinés à la destruction, avec l’idée de ne pas recréer de la matière parce que l’industrie textile est l’une des plus polluantes au monde. Il y a une vraie dimension écologique dans la fabrication de mes articles. J’utilise aussi du lin, fabriqué et tissé en France ou en Belgique. Il faut une empreinte carbone la plus minimale possible.

Mes enfants sont très engagés dans l’écologie, ça a été une évidence : il fallait que je parte sur quelque chose d’écologique.

Et vous me disiez que vous aviez acheté un grand carton de chutes, vous vivez encore avec ça ?

Oui, je passe aussi par Emmaüs car ils ont régulièrement des chutes de tissus, je fais aussi des vide-greniers, je récupère de vieux vêtements…

Donc là vous êtes plutôt sur des habits, ce n’était pas le cas au début, au début vous étiez plus sur les gigoteuses, les sacoches…

L’idée, dans mon business plan, c’était de faire des bloomers, des sacs, des vêtements d’enfant et des accessoires.

Je me suis rapprochée d’un magasin qui fait de la location de couches pour enfant. Ils ont un coin artisan, j’ai proposé d’y mettre mes gigoteuses, puis des écharpes de portage, des petits bavoirs…

Ce qui se vend le plus sur les marchés, ce sont justement des pochettes, des trousses de toilette, des sacs-bananes… C’est carrément à la mode ! Je compte proposer aux clients de composer eux-mêmes leurs pochettes, en prédécoupant et choisissant les tissus.

Et vous passez combien de temps à votre atelier par jour ?

 [Rire] Beaucoup, beaucoup trop, je n’ai pas encore trouvé de rythme. Je suis à 12 heures par jour.

Et physiquement ?

Physiquement, ça va, parce que je suis à la machine, je suis à la coupe, je suis sur l’ordinateur…

Les bananes aujourd’hui, ce sont systématiquement des bananes ou vous faites aussi un système de sac ?

Elles sont assez longues pour être mises soit à la taille soit en sac. Je fais différentes tailles : sur un marché, un papa m’a dit qu’il aimerait acheter la même banane pour sa fille et pour sa femme, à deux tailles différentes. Je me suis mise à faire toute une série de petites bananes. Je vais en faire des très grandes qui fassent aussi sac à langer.